Un éditorialiste du Point – Pierre-Antoine Delhommais – a récemment « allumé » Emmanuel Macron à propos de sa position en faveur du paquet à 10 euros. Voici des extraits de son texte qui revient, fort pertinemment, sur le thème de notre pouvoir d’achat … à nous les fumeurs.
« Le projet d’Emmanuel Macron est assurément très ambitieux. Non seulement le candidat entend « changer le logiciel » de la France, mais il veut aussi débarrasser le pays de ses vices, ce qui représente, convenons-en, un défi plus grand encore que celui de réduire la dette publique. Il a déclaré que, s’il était élu, il augmenterait de plus de 40 % le prix du paquet de cigarettes, pour le porter à 10 euros, « une frontière symbolique, significative et dissuasive ».
• Contrairement à d’autres sujets où sa pensée a quelque peu fluctué au cours des derniers mois (…), celle sur le tabagisme n’a pas varié. Lors d’un déplacement, en janvier, à Nœux-les-Mines, le fondateur d’En marche ! avait expliqué que « l’alcoolisme et le tabagisme se sont peu à peu installés dans le bassin minier. Il faut traiter cela en urgence afin de rendre le quotidien de ces personnes meilleur ». Mais comme le fait remarquer l’éditorialiste qui souligne le lien entre prévalence et perte d’emploi : « le moyen le plus efficace de lutter contre le tabagisme et ses dégâts consiste à faire baisser le chômage. Et non, l’inverse, comme le laisse entendre M. Macron ».
• Il est vrai aussi qu’en tant qu’ancien locataire de Bercy il est parfaitement conscient de la manne que représentent pour l’État français le tabac et l’alcool (…) une quinzaine de milliards d’euros par an, trois fois plus que l’ISF. Ce qui rappelle d’abord que les impôts sur les pauvres rapportent plus que les impôts sur les riches. Ce qui veut dire aussi qu’augmenter fortement le prix du paquet de cigarettes, comme le préconise le candidat « ni de gauche ni de droite », ce n’est pas « de gauche » du tout. C’est pénaliser en premier lieu les personnes les plus défavorisées.
• Le poste de dépenses consacrées au tabac peut peser très lourd dans le budget des ménages : jusqu’à 25 % de leurs revenus pour les 10 % de fumeurs les plus pauvres, mais seulement 2 % pour les fumeurs les plus aisés. Dans ces conditions, des hausses fortes et répétées du prix des cigarettes ont pour conséquence, dans un cercle à proprement parler vicieux, de précariser une part croissante des fumeurs et d’accélérer leur paupérisation (…) Pour une personne fumant un paquet de cigarettes par jour, une hausse de 3 euros de son prix représente une dépense annuelle supplémentaire de 1 095 euros. Soit très exactement le montant moyen de la taxe d’habitation dont M. Macron souhaite exonérer 80 % des Français.
• Motivée par ce nouvel hygiénisme en vogue auprès de la substantielle composante bobo de son électorat, l’intention d’Emmanuel Macron d’augmenter à 10 euros le prix des Camel et des Marlboro démontre de façon éclatante, pour ne pas dire fumante, qu’il ne suffit pas de s’autoproclamer le candidat des classes populaires pour l’être. Il y aurait d’ailleurs une certaine cohérence idéologique de la part du grand favori des sondages à annoncer prochainement que, s’il est élu, il choisira de baisser de 40 % le prix du paquet de 500 grammes de quinoa.